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Endométriose : Comment aborder cette pathologie féminine fréquente mais encore mystérieuse ?

30/11/2019

Dr L. Tebache
Dr G. Brichant
Dr M. Nisolle


L’endométriose est une maladie hormonodépendante, évolutive, récidivante, qui peut être à l’origine d’une dysménorrhée, de douleurs pelviennes chroniques, de dyspareunie, de dyschésie, et d’infertilité. Elle est définie par la présence d’épithélium et de stroma endométrial en dehors de la cavité utérine et concerne 10 % des femmes. Plusieurs théories tentent d’expliquer sa survenue mais son étiologie exacte reste encore méconnue, malgré la recherche active dans ce domaine.

L’endométriose est située le plus souvent au niveau du pelvis (ovaires, trompes, compartiments antérieur, latéraux et postérieur pelviens), qui est le siège de lésions nodulaires de couleur variant selon l’état d’évolution de la maladie, de lésions fibrotiques, d’une hypervascularisaiton péritonéale et d’adhérences lâches et/ou denses entre les organes. Toutefois, la plupart des organes ou tissus du corps féminin peuvent être touchés (diaphragme, poumon, etc). L’endométriose peut aussi se développer sur du tissu cicatriciel principalement dans les suites d’une césarienne ou d’une épisiotomie.

L’endométriose profonde (EP) est définie par la présence de tissu endométrial infiltrant de plus de 5 mm des structures anatomiques en dehors de l’utérus. Les sites anatomiques concernés comprennent généralement les ligaments utéro-sacrés, le cul-de-sac vaginal postérieur, le septum recto-vaginal et la paroi musculaire de la vessie, du recto-sigmoïde et de l’uretère.

L’endométriose interne, appelée adénomyose, est définie par la présence d’endomètre au sein du myomètre. Bien que d’association fréquente (20-80 % selon les études), l’endométriose (externe) et l’adénomyose sont considérées comme deux pathologies distinctes.

L’endométriose est également plus souvent associée à d’autres étiologies de douleur pelvienne chronique (cystite interstitielle, syndrome du côlon irritable, etc.) par rapport à la population générale.

L’examen clinique à l’aide du toucher vaginal permet le diagnostic (palpation d’un nodule douloureux au niveau du cul-de-sac de Douglas). L’échographie transvaginale confirme la présence des lésions d’endométriose. La mise au point pré-opératoire peut être complétée, si besoin, par une résonance magnétique pelvienne ainsi qu’un lavement baryté.

Le traitement recommandé de l’EP consiste en une prise en charge médico- chirurgicale combinée à un soutien psychologique afin d’améliorer la qualité de vie des patientes. La prise en charge en procréation médicalement assistée peut être nécessaire pour les patientes qui souffrent également d’infertilité (environ 40 %).

Le traitement médicamenteux consiste principalement en une thérapie hormonale oestro-progrestative ou progestative pure, séquentielle ou continue, avec pour objectif principal une ovariostase associée, dans certains cas, à une aménorrhée artificielle. Le traitement hormonal doit être adapté afin de générer le minimum d’effets secondaires, pour ne pas détériorer la qualité de vie de manière iatrogène. Les antalgiques de premier et second pallier sont souvent nécessaires pour juguler les douleurs et doivent être anticipés dès l’apparition de la douleur afin d’être efficaces. Leur administration doit tenir compte des comorbidités associées à leur prise chronique et doit être adaptée pour chaque patiente.

L’éradication chirurgicale de l’EP et la restitution de l’anatomie pelvienne normale par laparoscopie conventionnelle ou robot-assistée ont fait leur preuve dans l’amélioration de la qualité de vie des patientes.

Lorsque le rectum ou le colon sont concernés, on distingue trois techniques chirurgicales : le shaving rectal, la résection discoïde et la résection segmentaire colorectale. Il existe une association claire entre la radicalité du geste opératoire et les risques encourus par la patiente (notamment de fistule rectovaginale).

Cette chirurgie, qu’elle soit conservatrice ou radicale, est associée à une morbidité non négligeable inhérente aux dissections anatomiques étendues réalisées au contact de structures nobles (organes, vaisseaux et nerfs pelviens), dans un contexte de fibrose et d’inflammation. Dans ce cadre, le recours à la technique de préservation nerveuse permettrait la protection de l’innervation autonome des organes pelviens et par conséquent la réduction de l’incidence de troubles fonctionnels urinaires, digestifs et sexuels liés à cette chirurgie complexe.

En ce qui concerne la réserve ovarienne, il existe différentes techniques de préservation du parenchyme ovarien (afin de favoriser les chances de procréation et d’éviter une ménopause précoce). La vaporisation de la paroi kystique à l’aide du laser CO2, afin d’éviter une kystectomie classique délabrante, a prouvé son efficacité.

Le caractère chronique et récidivant de la maladie et les séquelles postopératoires potentiellement irréversibles, amènent naturellement à une philosophie chirurgicale de plus en plus répandue dans les centres d’endométriose à travers le monde : réalisation d’une éradication des lésions d’endométriose, unique, précoce (afin d’éviter des gestes opératoires agressifs) et complète tout en préservant les organes pelviens.

Le caractère multidisciplinaire de la mise au point et de la prise en charge médico-chirurgicale de cette maladie invite les patientes à s’orienter vers des centres d’endométriose de référence pour leur traitement et leur suivi.